Propriétaires-bailleurs : vers des changements fiscaux majeurs

Face à une crise immobilière qui fragilise l’investissement locatif, le gouvernement envisage de créer un statut du bailleur privé. Inspiré d’un rapport parlementaire, ce nouveau cadre offrirait des avantages fiscaux inédits, comme la possibilité d’amortir les biens mis en location. Mais son adoption dépendra des arbitrages budgétaires et de débats parlementaires qui s’annoncent houleux.

Un projet ambitieux pour relancer l’investissement locatif
La crise du logement pèse lourdement sur l’offre locative en France. Pour redonner envie aux particuliers d’investir, la ministre du Logement Valérie Létard a mandaté un rapport confié au sénateur Marc-Philippe Daubresse (LR) et au député Mickaël Cosson (Les Démocrates). Remis fin juin 2025, ce rapport propose la création d’un statut fiscal du bailleur privé.
 

La mesure phare serait la possibilité d’amortir fiscalement les biens loués nus : 5 % de leur valeur (hors terrain) sur vingt ans pour les logements neufs, 4 % pour l’ancien, à condition de réaliser des travaux représentant au moins 15 % de la valeur du bien. Un bonus d’amortissement (jusqu’à 1,5 %) serait accordé si le logement est loué à un niveau de loyer social, intermédiaire ou très social.
 

Pour les bailleurs au régime microfoncier, l’abattement forfaitaire passerait de 30 % à 50 % pour les revenus locatifs nus, avec un plafond relevé à 30 000 euros. Les meublés, déjà avantagés, conserveraient leur régime actuel. Autre proposition forte : exclure de l’assiette de l’IFI les biens loués en résidence principale.
Selon nos informations, un article devrait être intégré au projet de loi de finances 2026 (PLF 2026) pour mettre en place ce statut dès le 1er décembre 2025. Si elle est adoptée, cette réforme marquerait un tournant majeur pour les investisseurs particuliers.

Des obstacles budgétaires et juridiques à lever
Ce projet suscite déjà de vifs débats. Selon une étude du cabinet Asterès réalisée pour le Collectif des experts-comptables de la location meublée (CECLM), le coût budgétaire de la mesure pourrait atteindre entre 1,4 et 1,8 milliard d’euros en 2030, bien plus que les 457 millions estimés par les parlementaires. Bercy pourrait donc tenter d’en réduire la portée.
 

Sur le plan juridique, le Conseil d’État a été saisi pour examiner la constitutionnalité du dispositif. La question centrale : peut-on créer un avantage fiscal qui ne s’applique qu’aux biens acquis après une date donnée, au risque de créer une rupture d’égalité devant l’impôt ? La conditionnalité de travaux imposée pour les logements anciens devrait permettre de contourner cet écueil.
 

Les débats parlementaires pourraient également modifier le dispositif. Certains élus souhaitent par exemple conditionner l’amortissement à des contraintes environnementales (rénovation énergétique) ou renforcer les obligations sociales des bailleurs. Enfin, le climat politique reste incertain : si le budget 2026 n’était pas adopté, la réforme pourrait être repoussée ou enterrée.
 

En parallèle, d’autres mesures sont à l’étude, comme la révision du décret de 1987 sur les charges locatives récupérables, afin d’intégrer de nouveaux équipements (bornes électriques, visiophones, dispositifs de sécurité), ou encore une réforme des dépôts de garantie et des assurances loyers impayés.